Atelier de photographie à l’Espace de vie enfantine de la Cigogne

Munis le temps d’une journée d’appareils photo, des enfants de trois ans ont saisi par l’image des fragments de leur quotidien au sein de l’institution de l’EVE de la Cigogne. Cette expérience a été l’occasion de prendre du temps ; pour les enfants, celui de transmettre leur attention pour des ressources qui les font grandir et penser, pour les adultes, celui d’entrer dans le regard des enfants et leur manière de faire sens des différentes altérités qui les  entourent.

Ce moment de partage en images a mis en valeur l’importance de plusieurs thèmes ou temps sur lesquels travaillent les professionnels de l’enfance : des repas, siestes et activités d’éveil à la socialisation, l’identité, la sécurité affective, ou l’attention. La dimension relationnelle est particulièrement présente au sein des images : celles-ci ne témoignent pas de réalités extérieures à l’enfant mais semblent attraper des moments sensibles, tactiles, au contact du monde et des autres.

Un film réalisé lors de cette journée permet de contextualiser cette expérience et d’en donner à penser les différentes dimensions. Il met en évidence la grande concentration des enfants, faisant connaissance avec un outil qui exige d’eux attention, choix des sujets et de la manière de témoigner d’une émotion. Leurs réactions, hésitations, et rires habillent les résultats photographiques d’une épaisseur d’imprévus et de possibles.

Le petit enfant (0 à 4 ans) perçoit le monde qui l’entoure avec une intensité et une attention toutes particulières. Ce corps en mouvement, dont on sait à quel point il est par la suite culturellement constitué, s’offre alors sans hésitation au monde qui l’entoure. Tâtonnée, touchée, goûtée, caressée ou secouée…, la matière que touche l’enfant est comprise et constituée comme telle au travers de gestes quotidiens et curieux. L’enfant en découvre les aspects finis comme il découvre l’infini des relations dans lesquelles il peut s’inscrire. Observer ces interactions en tant qu’adulte nous raconte à quel point notre engagement profond dans ce réseau de relations reste crucial afin de voir se dessiner du sens dans nos actions, à travers elles.

Les structures d’accueil de la petite enfance partagent l’ambition d’accueillir les enfants sans discrimination et de les accompagner dans leurs découvertes en soutenant leurs élans et capacités. Fortes de cette visée commune, plusieurs institutions du Canton de Genève, conscientes des multiples questions soulevées, proposent des manières diverses d’aller à la rencontre des différentes altérités constitutives du monde avec les enfants. Des structures-cadre se dessinent au gré des différents projets pédagogiques. Échafaudages, supports, elles offrent au temps de l’enfance une épaisseur précieuse. Cette exploration du sensible aux côtés d’adultes attentifs est l’occasion d’un apprentissage réciproque et de la constitution d’individualités en relation les unes avec les autres.

Dans le cadre du projet Enfants Reporters et à l’occasion de la célébration des trente ans des Droits de l’Enfant, la présentation d’une dizaine de projets portés par ces institutions permet d’esquisser un portrait des réflexions et outils mis en place par les professionnels de l’enfance pour permettre un dialogue plus direct et plus riche avec le petit enfant, dont la manière d’être au monde sera toujours singulière. Ainsi se déploie une panoplie de moments, des ateliers parlotte et leur capacité à solliciter le discours comme l’écoute, aux expériences de dessin, de photo ou de film mettant à portée d’enfant des médiums riches pour leur faire attraper et raconter leur relation affective au monde, sur des sujets aussi délicats que les gestes du quotidien, l’environnement naturel en mutation, le droit à l’expression créative, le droit de jouer, la précarité ou le droit à un toit.